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10/07/2010

Alphabet

Pour ceux qui habitent Nice, vous le savez sûrement déjà : le Théâtre de l’Alphabet ferme définitivement ce soir, samedi 10 juillet 2010, Après 26 années d’existence.
Henri LEGENDRE avait d’abord ouvert son théâtre rue de Roquebillière, dans des locaux forts différents de ceux situés au 10, boulevard Carabacel.
De plus grande dimension, cette salle convenait bien alors aux mises en scènes contemporaines, non conventionnelles, telles que les affectionnait particulièrement Henri durant ces premières années.
Puis il s’installa dans les locaux que nous connaissons aujourd’hui. Même s’il conservera jusqu’à la fin ce goût pour les auteurs modernes, cette volonté de présenter au public des textes qui ne font pas forcément recette, il consacrera désormais tous les débuts de saison aux « classiques » : Molière (bien sûr) mais aussi Racine, Corneille, puis Musset et Marivaux… Ainsi, l’Alphabet est devenu LE lieu où des milliers de collégiens et de lycéens sont venus, de Nice mais aussi de tout le reste du département, découvrir les pièces dites « du répertoire ».
Avant de poursuivre, je vous demanderai de cliquer sur l’image afin de visionner une courte vidéo diffusée sur France-3 à ce sujet.

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Comme il est dit dans ce reportage, la formation fut l’autre action concrète menée durant ces vingt-six années. Et la présentatrice n’exagère pas du tout lorsqu’elle évoque ces milliers d’élèves qui se sont succédés. Plusieurs d’entre eux ont d’ailleurs réussi à mener une carrière d’artiste, dans notre région ou à Paris, sur la scène ou à l’écran, comme comédien et comme metteur en scène.
Toutefois, les élèves qui se sentiront orphelins ce soir, auront l’occasion par la suite de rencontrer et d’expérimenter d’autres formes d’expression théâtrale, et de compléter ainsi leur bagage.
En effet, même si Henri reste l’un des meilleurs professeurs que j’ai connus, savoir rire et savoir pleurer à la commande ne sont que les bases, pas le métier. Il faut ensuite répéter, jouer, répéter, jouer… etc.

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Mais puisque nous parlons de base : c'est en croisant des comédiens qui avaient été formés ailleurs qu'au Théâtre de l'Alphabet que j'ai pu découvrir ce qu'il leur manquait.
J'ai pu voir en négatif les bases que j'avais reçues et qu'il n'avaient pas.

26/04/2010

Solo Para Paquita

Vendredi 23 au soir, j’ai assisté pour la première fois à une représentation en appartement. Nous étions 22 spectateurs à nous être déplacés jusqu’au boulevard Carnot, près du quartier du port, chacun apportant quelque chose à grignoter ou à boire. Notre hôte — ancien danseur classique — nous a alors installés dans son grand salon, pour déguster un café avant la représentation.
La régie était prête : un PC portable équipé d’une paire de tweeters et d’un caisson de basse pour la bande son — de la musique, composée pour ce spectacle par Mathieu GEGHRE ; deux ou trois lampes de salon et autres halogènes ainsi qu’un petit projecteur, habillé d’une gélatine bleue.
La pièce pouvait commencer : un monologue, écrit par le dramaturge espagnol Ernesto CABALLERO, dans lequel Paquita, une femme comme toutes les autres, se raconte. Elle raconte ses petites superstitions, ses soirées au Bingo, puis sa rencontre, sa passion pour un homme qui la trahira… et qu’elle va tuer. On apprend alors que ce que nous venons d’entendre n’est qu’un rappel du passé, et que le public, avec la comédienne, participe à une thérapie de groupe. Puis d’autres tiroirs vont encore s’ouvrir, les spectateurs étant une fois de plus manipulés, jusqu’au dénouement final.

 

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Fin, très bien écrit (et traduit), très bien joué, très bien mis en scène, on reste pantois devant une telle performance. A cela s’ajoute la parfaite adéquation de ce spectacle avec le jeu en appartement. Tout l’aspect "confession publique" est ainsi mis en relief sans recourir à aucun artifice, et pour cause : les spectateurs se retrouvent figurants du spectacle qui se déroule devant eux.
La formule, certes, n’est pas nouvelle. Mais quoi de réellement nouveau dans les théâtres ? A la nouveauté, je préfère de loin ce qui est créatif. Car ce n’est pas la même chose. Être créatif, c’est faire de la toute petite nouveauté. Cette accumulation de trouvailles et de rencontres, de décisions périlleuses. C’est cet ensemble de réglages qui est inédit, sans être révolutionnaire.
En effet, ces dix dernières années, on trouvait encore des troupes de théâtre qui installaient un écran vidéo sur la scène, juste pour dire que c’était nouveau, moderne et autres balivernes…

 

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Le Spectacle Vivant est aussi affaire de rencontres. Pour cette pièce, ce fut entre Émilie PIRDAS, comédienne professionnelle (c'est-à-dire ayant le fameux statut Intermittent) et Isabelle BONDIAU-MOINET, autre comédienne professionnelle (c'est-à-dire ayant aussi du mal à conserver son statut d’Intermittente).
Émilie avait jusqu’à lors une expérience de comédienne, pas de metteur en scène. Ces dernières années, elle avait beaucoup travaillé avec la compagnie Sîn (on l’a vue dans Le Cri du Cœur) et avait ainsi participé à des créations collectives. Mais SOLO PARA PAQUITA était sa première mise en scène à part entière, le premier projet qu’elle a du porter seule.
Enfin, « seule » c’est une façon de parler, car Isabelle est LA comédienne qu’il lui fallait pour dire un texte aussi subtil, aussi travaillé et aussi structuré. On avait déjà pu admirer son travail au sein de la Cie Alcantara, dans Paroles d’Étoiles notamment.
Cette collaboration ne signifie nullement qu’elles aient chacune quitté leur compagnie respective, simplement qu’elles avaient envie de travailler ensemble.

Une autre metteur en scène expliquait que « ce monologue pourrait être le miroir déformant de nos fantasmes. La question du passage à l'acte, du fantasme à la réalité se développe devant nos yeux : Paquita passe à l'acte. »
Je préfère les explications d’Émilie PIRDAS qui souligne le fait que, femme ou homme, on se laisse parfois avoir par l’Autre, naïvement. Et cette souffrance, si bien écrite, ne doit pas être jouée avec rancœur, voire dans un esprit de contestation féministe trop convenu, mais avec cette même naïveté qui engendre de l’empathie pour ce personnage — qui, malgré tout, a assassiné quelqu’un !

 

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C’est un spectacle qui a été crée au Théâtre de la Semeuse en décembre 2009 (cliquez ICI pour relire l’article) puis joué au Théâtre de la Tour et au Théâtre du Port cette année.
Pour ces deux représentations en appartement, la participation était libre « pour nous aider à payer nos frais de communication et le travail fourni » comme il était indiqué dans l’annonce.
Dès que ce spectacle sera à nouveau à l’affiche, dans un théâtre ou dans un salon, il ne faudra pas hésiter une seconde à aller écouter cette Paquita vous raconter ce qui est «stimulant, amer et nécéssaire»

12/04/2010

Une très bonne idée

Voilà bien le genre de spectacle qui rend jaloux les autres compagnies : « mais pourquoi n’y ai-je pas pensé avant ! ».
Il s’agit d’une pièce qui s’est jouée ce week-end au théâtre Francis Gag, à Nice, et intitulée HÔTEL DU NORD. Oui, c’est le film de Marcel CARNÉ, sorti en 1938, avec une distribution fameuse : Arletty, Louis JOUVET, Jean-Pierre AUMONT, François PÉRIER, Bernard BLIER… et adapté à la scène grâce au talent de Stéphanie CHARLES et Jean-Marc THÉROND.

 

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Certes, ce n’est pas la première fois qu’on adapte un film, même culte, au théâtre. Mais encore faut-il bien choisir. Je corrigerai donc le titre de ce billet et dirai plutôt : « excellent choix ! »
En effet, avant de lancer toute une équipe dans un tel projet, il faut être sûr que les talents de chacun seront bien employés. Par exemple, de telles adaptations nécessitent souvent que chaque comédien se voit confier plusieurs personnages (il y a en moyenne plus de monde dans les productions cinématographiques qu’au théâtre). C’est extrêmement jouissif pour l’artiste, c’est un rôle en or, mais pour que la magie opère, il faut que cela soit bien réalisé.
Pour Hôtel du Nord, Claire DEVAL, Ali BOUDIAF et Karim BADI interprètent à eux seuls sept personnages :
Pierre et Renée, le jeune couple — ils sont déjà aigris et désespérés, ils vont tenter de mettre fin à leurs jours ;
Monsieur Edmond et Madame Raymonde, sa "protégée" ;
Prosper Trimaux, Éclusier (le canal n’est pas loin) ;
Nazarède, un truand qui "recherche" Monsieur Edmond ;
et aussi un Commisaire.


Pour cette adaptation, le choix a été fait de découper les scènes essentielles du film et de les présenter les unes après les autres. Ce n’est pas une obligation, mais au théâtre les pièces peuvent être divisées en actes, en tableau et en scènes : un changement de scène correspond à l’entrée ou à la sortie d’un ou plusieurs personnages ; un nouveau tableau correspond à un changement à vue du décor ; un changement d’acte correspond à un baisser du rideau ou à une extinction des lumières, à un noir. Dans notre cas, la salle étant plongée dans le noir presque à chaque changement, on pourrait dire qu’il s’agit d’une comédie en quinze actes, mais c’est une façon de parler. En réalité, la mise en scène de Paul LAURENT, très soignée, avait retenu trois lieux essentiels du film : le comptoir, une chambre et le devant de l’hôtel. Il y avait donc une partie de la scène quasiment vide, une autre où trônait un comptoir garni de quelques bouteilles et enfin, en fond scène, un décor de chambre d’hôtel, masqué par un panneau de tissu tendu, une sorte de tulle, qui ne laissait apercevoir la chambre que lorsqu’elle était éclairée.


Ainsi, pour réussir ce spectacle, il aura d’abord fallu sélectionner les moments réellement significatifs, les présenter dans un ordre qui ne trahisse pas le film mais qui permette de promener le public d’un lieu à un autre, afin de garder du rythme ; réduire le nombre de protagonistes et réécrire les dialogues mais faire en sorte, les comédiens n’étant que trois, que chaque scène ne mette en présence qu’une femme et deux hommes au maximum…
Il fallait ensuite que ces comédiens transforment l’essais : trouver une voix, une attitude… C’est dans l’ensemble assez réussi, le public a la joie de voir un comédien incarner plusieurs personnes et y croit tout de même. Toutefois, il m’a semblé que c’était un peu binaire. Par exemple, Madame Raymonde, la prostituée à la gouaille bien parisienne, était toujours en énergie, râlant, tenant tête, en colère ; tandis que Renée, la jeune femme, était systématiquement calme, triste et effacée.
Attention, je pinaille, car Claire DEVAL est parfaitement à l’aise dans ces rôles ; le charisme d’Ali BOUDIAF fait merveille et nous étions tous plongés dans cet univers parisien d’avant-guerre. On sent toutefois que ce spectacle est encore un peu frais (c’est réellement une création, et ce n’était que la deuxième représentation !) D’ailleurs, il n’a duré qu’une heure et dix minutes, et je suis persuadé qu’avec quelques silences, des comédiens davantage installés dans leurs personnages, la pièce gagnera encore en efficacité.

 

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De toute façon, la base est saine, si je puis m’exprimer ainsi, et dès que d’autres dates seront programmées, je ne manquerai pas de vous conseiller ce spectacle, issus du croisement de plusieurs talents, et notamment celui de Paul LAURENT. Sans être une star du show-biz, il demeure tout de même une valeur sûre. Il est metteur en scène mais aussi comédien et travaille à Lille, Paris et sur les Alpes-Maritimes.
Il est aussi formateur :
— chargé de cours à l’université de Lille III / sciences humaines, dans le cadre du Diplôme d’Etudes Théâtrales ;
— responsable artistique et pédagogique de l’École Régionale de théâtre gestuel de Wasquehal ;
— cofondateur du Théâtre du Pantaï avec Jean-Claude BUSSI.

 

 

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Claire DEVAL m’a déjà confié qu’ils joueront le 08 mai, au Centre Culturel de Touët-sur-Var. Ce qui confirme ce que je pressentais : les villages des Alpes-Maritimes ne sont pas en reste côté programmation. En effet, l’association Dessous de Scène, qui gère ce lieu de culture, a souvent permis aux Touëtans de découvrir de très bons spectacles. (Le site est déjà en lien en haut de la Colonne de Gauche.)

 

01/04/2010

le journal, le spectacle et la video

Ce billet est une suite de l’avant-dernier article que j’avais posté le 17 mars, et consacré au spectacle les Funambules. Lorsque je dis « consacré », je devrais plutôt dire « à l’encontre de », tant ce spectacle m’avait déçu.
C’est alors que je me suis aperçu que le journal culturel gratuit La Strada consacrait toute la couverture de son N° de mars à cette création, ainsi qu’un article très positif de près d’une demi-page. J’ai alors contacté le rédacteur de l’article, en lui demandant de me décrire les raisons de son enthousiasme.
Je vous reproduis ici le message que je lui ai adressé (sur Facebook) ainsi que sa réponse :

L U C : Bonjour […] nous nous sommes croisés au Théâtre de l'impasse, en compagnie de […] J'ai remarqué que vous avez signé, dans « La Strada », un article assez élogieux sur le spectacle « les Funambules », de la Cie B.A.L.
J'avoue que c'est une création que je n'ai pas aimée du tout. (vous pourrez vous faire une idée plus précise de ce que j'en pense en lisant mon petit blog […])
Je suis surpris par votre enthousiasme, notamment votre conclusion : « Une oeuvre magistrale, visionnaire, engagée, qui réveille et questionne profondément. »
Le peu que je connais de vous me laisse penser que vous êtes plutôt exigeant en matière d'art. Aussi, auriez-vous quelques minutes à me consacrer, pour développer en quelques lignes ce qui vous a séduit dans ce spectacle ? Pourrais-je éventuellement reproduire votre réponse pour les lecteurs de mon blog ?
A bientôt j'espère, devant un verre ou une scène.

Le Journaliste : Un, si on se connait , Pourquoi, tu me vouvoies ? 2: j'ai jugé le spectacle sur un montage vidéo, donc trompeur.3 Depuis quand doit-on justifier de ses écrits ?

L U C : Bonjour […] il est vrai, j'ai ce côté un peu « vieille France », qui me pousse à vouvoyer les personnes que je n'ai pas eu l'occasion de côtoyer très longtemps. Mais puisque tu m'y invites, je te tutoie avec plaisir.
Merci également pour ta réponse, brève mais suffisante.
En effet - et je réponds à ton point N°3 - il ne s'agit pas d'avoir à justifier quoi que ce soit. Il s'agit pour moi d'intéresser le plus de gens possible. C'est la raison d'être du blog que j'anime. Aussi, il me semblait intéressant pour les lecteurs de publier un avis contraire au miens.

Bonne soirée.

Ainsi, cet article a été rédigé sur la foi d’une vidéo. Comme le reconnaît lui-même notre journaliste, c’est trompeur. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle j’évite d’en proposer ici. (je vous propose tout de même celle des Funambules qui est passée sur F3 : cliquez sur l’image)
Les vidéos de présentation ne devraient servir, me semble-t-il, qu’aux professionnels ou aux collectivités à la recherche de spectacles pour leurs programmations (et là, au moins, c’est très efficace).

 



Découvrez "Les funambules" de la compagnie B.A.L. au Théâtre de Nice sur Culturebox !

17/03/2010

Tu as oublié un « orgie » coco...

Un de mes souhaits les plus fréquents, c’est de voir le public sortir davantage de son petit cocon télévisuel pour aller à la rencontre de la multitude de spectacles qui jaillissent un peu partout, feu éphémère et pourtant nécessaire.
Je le répète à qui veut m’entendre : « prenez des risques ! » — c'est-à-dire risquez de gâcher une soirée confortable à la maison pour aller découvrir des œuvres qui ne vous plairont pas toujours. « Tentez le coup ! »

Et pourtant, aujourd’hui, je vous en conjure, N’ALLEZ PAS VOIR « Les FUNAMBULES », un spectacle proposé par la Cie B.A.L. [Bal d’Art Léger] et programmée au TNN du 16 au 21 mars !
Sur le papier, cela partait plutôt bien : une création mêlant danse, chant et théâtre ; une distribution alléchante, avec Monique LOUDIÈRES, ancienne étoile du Ballet de l'Opéra de Paris dans une chorégraphie d’Éric OBERDORFF ; une co-production incluant notamment le Théâtre de Grasse, connu pour sa programmation de qualité…
Las, ce fut pitoyable. J’ai cru pendant près d’une heure qu’il allait se passer quelque chose, que c’était du second degré. Mais non.

Je n’en veux pas à cette compagnie d’avoir produit un travail qui me semble dénué d’intérêt, de sens, de créativité et d’esthétique. Je ne m’en prend pas à un texte qui aurait voulu dire de grandes choses mais qui ne faisait que bavarder. C’est peut-être le public qui n’a rien compris ce soir-là (c'est-à-dire la moitié de l’assistance qui a vidé les lieux avant la fin et l’autre moitié qui est restée par politesse).
Jamais je ne réclamerai une obligation de résultat à un artiste. Si cette compagnie a créé un tel spectacle, digne d’une kermesse d’école, elle a ses raisons, que j’ignore.

C’est contre le TNN que je suis en colère. Comme toutes les grosses institutions, il a des responsabilités, différentes de celles des créateurs.
Il doit, c’est entendu, faire découvrir des créations peu connues, aider les petites structures ; surprendre aussi, MAIS PAS TOUT LE TEMPS.
Car enfin, sur l’ensemble des spectacles que j’ai pu voir dans ce théâtre dirigé par Daniel BENOIN, un seul a soulevé l’enthousiasme, c’est le fameux « la Vie devant Soi ». Tous les autres m’ont déçu.

Les amateurs de B.D. se souviendront peut-être, dans « Astérix et le Chaudron », du passage ou GOSCINNY, déjà à cette époque, se moquait de ce théâtre prétendument d’avant-garde, en montrant une troupe préparer un spectacle affligeant ; on y voyait un comédien déclamer : « orgies, orgies, nous voulons des orgies ! »… et Obélix dans son meilleur rôle ! Eh bien, le spectacle « Les Funambule » est à mi-chemin entre cela et « l’Île aux Enfants », émission culte de la télé des seventies… mais en moins bien, en moins créatif.

09/12/2009

Lecture

40 ans du TNN-02.jpgJ’ai été invité ce mardi 08 décembre à fêter les 40 ans du TNN en assistant à une lecture, dans la grande salle "Pierre Brasseur".
Daniel BENOIN et quelques-uns des comédiens permanents du Théâtre National de Nice ont ainsi lu, entre autres extraits, des passages de « la Promesse de l’aube », de Romain GARY ; « la Douceur de la vie » de Jules ROMAIN ; « le Père adopté » de Didier VAN CAUWELAERT ainsi que « Ballaciner » de J.M.G. Le CLÉZIO.

 

 

La lecture est un exercice périlleux pour plusieurs raisons :
En décidant de lire plutôt que de jouer, on se prive délibérément d’une grande partie de ses moyens d’expression et donc de création.
Pour éviter l’ennui qui guette le public à chaque ligne, il faut choisir des passages le plus courts possible, ce qui n’était pas le cas ce soir-là.
Attention enfin aux accrocs lors de la lecture elle-même, aux accidents de parcours et autre diction approximative. En effet, on choisit souvent de faire une lecture pour des événements qui ne seront pas reconduits : il est convenu qu’on ne répètera pas autant que pour une pièce jouée de nombreuses fois et que l’on compte sur le comédien pour compenser le peu de moyens alloués à ce travail.
Enfin, fallait-il garder la disposition classique d’une salle de théâtre : les artistes sur scène et le public au parterre ? Pour cette lecture qui m’a semblé un peu longue — malgré la qualité des auteurs convoqués — je pense qu’il aurait fallu demander aux comédiens de venir parmi le public, ou en tout cas le plus près possible, et adapter le dispositif scénique à cette formule.

Car il y avait un dispositif scénique. Simple, bien conçu, c’était un peu le fil rouge de cette lecture : les artistes qui ne lisaient pas attendaient assis, dos au public, sur des chaises faisant face à un immense écran, sur lequel étaient projetées des prises de vues de la villes de Nice (une sorte de promenade filmée façon Super-8 d’autrefois).
Quelques très bonnes prestations, des passages plutôt drôles et enfin un accompagnement musical de l’excellent Clément ALTHAUS ont permis à ces deux heures de ne pas paraître trop longues. Je dois même avouer que j’ai applaudi sans me forcer au moment des saluts.

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Pourtant, je persiste à dire qu’une lecture doit se travailler un minimum, que le comédien qui s’y aventure doit avoir une vigilance de tous les instants, déployer une énergie colossale, avoir un débit de parole légèrement ralenti et malgré tout faire court autant que possible.
Bien sûr, il faut tempérer ces observations en se rappelant que le public qui assiste à ces lectures est un peu plus détendu que d’habitude. Un peu comme si chacun venait à un rendez-vous d’habitués.

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06/11/2009

Et alors ?

« Une première en France », nous annonce le programme TV de ce samedi soir. Je n’ai pas vérifié, c’est sans doute vrai : c’est la première fois que l’on retransmet en direct à la télévision une pièce depuis un Théâtre National de province. Et c’est tombé sur le TNN, le Théâtre National de Nice.
Il s’agit de la pièce écrite par Jerry STERNER : « Other People’s Money », adaptée et traduite par Linda BLANCHET et Daniel BENOIN sous le titre plus connu de « A.D.A. — l’Argent Des Autres ».
Jerry STERNER, ex-homme d’affaire américain, a réussi une carrière dans l’immobilier, avant d’entamer celle d’écrivain dramatique. Il écrit Other People’s Money en 1989 et connais un succès immense, aux Etats-Unis, mais aussi dans tout le reste du monde.

 

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Ce soir-là donc, à 20h30, nous sommes devant notre « poste de télévision », comme on disait autrefois. La soirée commence par un bref commentaire de l’incontournable Christian ESTROSI, flanqué de Daniel BENOIN.
Puis les caméras de France-2 pénètrent dans l’antre du TNN, et viennent solliciter Alexandra LAMY (oui, c’est celle de « Un gars une fille »…) qui va interpréter Kate, la jeune avocate et Michel BOUJENA, qui lui interprètera Larry-le-Liquidateur, Lawrence Garfinkle.
J’avoue que cela m’agacerait profondément si quelqu’un venait me demander mes impressions sur la pièce que je vais jouer dans cinq minutes, mais bon, les deux comédiens semblent plus solides que moi.

Le spectacle commence. Rapidement, je comprends que je vais m’ennuyer. Le texte (la traduction ?) est pataud, convenu ; tout est "téléphoné" ; les comédiens ne sont pas excellents, surtout Daniel BENOIN qui est carrément mauvais (il "met le ton", comme les enfants à l’école).
Et puis enfin, peu à peu, allez savoir pourquoi, la pièce décolle. Ça y est, je rentre dans l’histoire, je ne me pose plus de question, je reçois le spectacle tel quel.
Je pense que c’est au moment de l’entrée en scène d’Alexandra LAMY, qui est vraiment excellente : présence, interprétation, technique… du début à la fin, ce qui est encore moins évident. Michel BOUJENA cesse enfin de se comporter comme s’il réalisait un one-man-show et d’en faire des tonnes, enfin presque, car il aura encore deux ou trois fois un accent qui revient ou une grimace incontrôlée.
Le décor, les moyens techniques sont assez conséquents (changement "à vue" deux lieux différents reposent sur un plateau qui tourne, comme un gigantesque plateau à fromage, et nous permet d’imaginer qu’on se transporte instantanément de la grande métropole à la province) mais enfin, cette fois-ci cela sert le propos.

Mais plus encore que les décors et les éclairages eux-mêmes, c’est l’utilisation qui en est faite qui m’a beaucoup intéressé. En effet : alors même que le décors n’a pas fini d’être installé, les comédiens sont déjà en train de jouer. Ou parfois, c’est le contraire, les dernières répliques de la scène précédente sont dites sur le nouveau décor de la scène suivante !
Loin d’être un défaut qui détruit l’ensemble, ce procédé fait que la pièce gagne au contraire en dynamisme. Et cela donne même un sentiment de compression du temps (en effet, l’action est sensée se dérouler sur plusieurs mois).
J’aime beaucoup ce genre de mécanisme qui ne réclame aucun moyen technique, seulement humain, et donc qui peut être utilisé par tous. Je ne sais pas si c’est Daniel BENOIN qui en est l’inventeur ou si beaucoup d’autres s’en sont déjà servi, mais c’est tout à fait le genre de trouvaille que j’affectionne.

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Maintenant que quelques jours sont passés, je me pose une question qui mérite que l’on s’y attarde : « ET ALORS ? »
Oui, cette question, chaque artiste, et pas seulement dans le Spectacle Vivant, doit souvent se la poser. Pour savoir si ce que l’on fait est créatif, pertinent, et surtout si ce n’est pas simplement de l’esbroufe.
Et là, rappelez-vous, j’ai dit au début de cet article que c’était la première retransmission en direct depuis un théâtre national de province. ET ALORS ? Qu’est-ce que ça nous a apporté à nous, (télé)spectateurs ? Quelle est la pierre posée à l’édifice de la culture ? Et si cette pièce avait été enregistrée la veille puis diffusée sur France-2 plus tard, quelle différence aurions-nous perçue ?
Peut-être le public présent ce soir-là a-t-il lui senti quelque chose ? Mais j’en doute.