11/05/2009
Médiathèque, Médiathèque, dis-moi quels sont tous tes trésors !
On ne profite jamais assez de tous les DVD disponibles dans les médiathèques. J'ai récemment loué un reportage intitulé « Opération Shakespeare à la Vallée de Joux ».
Ce film retrace l'aventure de la Cie du Clédar, une compagnie de théâtre amateur ― c'est à dire que chacun des membres a un travail qui le nourrit et éventuellement lui plaît, et une passion de la scène qu'il assouvit le reste de son temps libre.
Cette compagnie du Jura, qui regroupe environs 25 personnes, suit depuis le début des principes qu'elle s'est elle-même fixés :
Ne faire appel qu'à des comédiens amateurs ;
S'entourer en revanche de professionnels pour les différents aspects artistiques et techniques (charpentier, chef de cœur, costumier ou maître d'arme...) ;
Aborder à chaque fois un genre différent (comedia dell'arte, épopée, clown etc.)
Jouer chaque spectacle dans un lieu différent du précédent ;
Ce lieu ne doit pas être un théâtre (les contraintes liées à un lieu qui n'est pas fait pour recevoir un spectacle est une source surprenante de création, il suffit pour s'en convaincre de penser au Palais des Papes hébergeant depuis 60 ans le Festival d'Avignon) ;
Enfin, ne faire qu'un spectacle tous les deux ans seulement afin de conserver intactes toutes les énergies et les envies (ce qui leur fait tout de même un " palmarès " de onze spectacles, tous très réussis).
Leur opus de 2005, pour le vingtième anniversaire de la troupe, est un spectacle intitulé « Naissance d'Hamlet, une fantaisie » qui met en scène le célèbre dramaturge et les conditions dans lesquelles il aurait pu écrire ce chef-d'œuvre.
Pour le réaliser, la Cie du Clédar a décidé de construire un théâtre Élisabéthain grandeur nature, inspiré du modèle qui se trouve à Londres, le Théâtre du Globe.
Après les représentations, l'édifice en bois, jaugeant 250 places, sera démonté. Fort heureusement, la commune voisine d'Yverdon-les-Bains a racheté l'ensemble et l'a reconstruit sur son territoire, pour en faire son théâtre d'été.
Le reportage réalisé par Anne CUNEO ne rajoute pas de commentaire, elle a préféré laisser s'exprimer les protagonistes de ce projet aussi fou que beau. Et mobilisateur : en effet, c'est toute la vallée qui s'investit tout les deux ans, pendant plusieurs mois.
On y trouve aussi les inquiétudes, les joies de chacun, la façon dont chaque comédien répète son texte ; dans la parole de chaque individu, on retrouve quelque chose d'universel. Ce qu'ils ont vécu, toutes les compagnies l'ont vécu, et pourtant de façon si différente.
Enfin, une fois de plus, on constatera que le travail de préparation est une constante incontournable et primordiale dans le Spectacle Vivant. La somme de labeur déployée pour cette entreprise est simplement colossale.
Crédit photo : Le Clédar - Anne CUNEO
La Cie du Clédar a depuis quelques années un site Internet bien à elle. Cliquez sur l'image pour y accéder.
Vous y trouverez notamment les informations sur leur prochaine création cet été. Les chanceux qui se trouveront dans cette région du Jura auront ainsi le privilège d'assister à l'une des 23 représentations, cinq semaines à cheval sur août et septembre. (notez le « .ch » de l'adresse, pour la suisse !)
Enfin, pour les habitants de la région niçoise, il vous est possible de louer (gratuitement !) ce DVD à la médiathèque Louis Nucera (référence D/792/OPE). C'est réellement un reportage d'une grande qualité.
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28/01/2007
B r è v e s
Je viens de me rendre compte que je suis devenu superstitieux... Comme tous ceux qui doivent monter sur les planches. Même si certains ne le reconnaîtront jamais, car s’imaginant ne pas l’être. Chacun est superstitieux à sa façon : cérémonial pour se mettre en condition (« allez, ça va commencer, on se tient tous les mains ! » ; déviance de ce qui est à l’origine un simple et nécessaire training d’acteur), alimentation (« la salade, ça fait bafouiller… » ; c’est sûr qu’il ne faut pas manger une daube-raviolis juste avant de grimper sur scène), accessoire (« putain, ce soir, j’ai pas la même chemise, je vais être mauvais ! » ; autrefois, on prétendait que le vert sur un costume portait malheur), partenaire (« ce soir, tu m’as pas regardé lorsque j’ai dit "phylactère", et du coup j’ai eu un blanc tu comprends ? ») et, pour ce qui me concerne, même la façon dont j’ai garé ma voiture (« je suis garé super près ! La chance est avec moi ! »
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« CYRANO
Ragueneau ne pleure pas si fort ! ...
(il lui tend la main.)
Qu’est-ce que tu deviens, maintenant, mon confrère ?
RAGUENEAU, à travers ses larmes.
Je suis moucheur de... de... chandelles, chez Molière.
CYRANO
Molière !
RAGUENEAU
Mais je veux le quitter, dès demain ;
oui, je suis indigné ! … Hier, on jouait Scapin,
et j’ai vu qu’il vous a pris une scène !
LE BRET
entière !
RAGUENEAU
Oui, monsieur, le fameux : " que diable allait-il faire ? ... "
LE BRET
Molière te l'a pris !
CYRANO
Chut ! Chut ! Il a bien fait ! ...
(à Ragueneau.)
La scène, n’est-ce pas, produit beaucoup d’effet ?
RAGUENEAU, sanglotant.
Ah ! Monsieur, on riait ! On riait !
CYRANO
Oui, ma vie
ce fut d’être celui qui souffle - et qu’on oublie !
(à Roxane.)
Vous souvient-il du soir où Christian vous parla
sous le balcon ? Eh bien ! Toute ma vie est là :
pendant que je restais en bas, dans l'ombre noire,
d'autres montaient cueillir le baiser de la gloire !
C’est justice, et j'approuve au seuil de mon tombeau :
Molière a du génie et Christian était beau ! »
En effet, MOLIÈRE, comme beaucoup d’autres à son époque et même certains aujourd’hui, empruntait des scènes à d’autres créateurs afin de les inclure dans ses œuvres, après les avoir bien sûr remaniées. Le résultat était souvent meilleur que l’original, et ce n’est pas sans raison qu’Edmond ROSTAND, lui-même formidable écrivain dramatique, fait dire à Cyrano que MOLIÈRE avait du génie.
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En relisant « Hamlet », de William SHAKESPEARE, je suis tombé sur le passage suivant :
« HAMLET – Rendez ce discours […] comme je l’ai prononcé devant vous, d’un ton facile et naturel ; mais si vous le déclamez avec emphase, comme font la plupart de nos acteurs, j’aimerais autant avoir mis mes vers dans la bouche d’un crieur de la ville. […] Oh ! rien ne me blesse l’âme, comme d’entendre un Stentor en perruque, aux robustes poumons, déchirer une passion en éclats, qu’il vomit aux oreilles d’un parterre ignare et frondant, dont la plupart ne veulent que du bruit, et ne sont capables de sentir autre chose que des pantomimes ridicules et inexplicables. […] que votre intelligence vous serve de guide… »
Cette pièce a été écrite entre 1598 et 1602. Comme après lui Auguste STRINDBERG dans ses préfaces, certains grands auteurs avaient, bien avant les autres, perçu l’importance de la vérité du jeu. Bien avant l’arrivée de STANISLAVSKI et de ses conseils éclairés sur « la Formation de l’Acteur », SHAKESPEARE nous montre ici l’avance qu’il avait sur son époque.
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« L'acteur doit se vider de lui-même, c'est son premier travail, et le plus important. » C’est un grand comédien qui a dit ça, et il n’a pas tort. Je vous dirai de qui il s’agit lors de la prochaine note… A moins que vous ne trouviez avant !
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