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15/12/2006

C'est Lorre

C’est la deuxième partie de cette interview consacrée à Emmanuelle LORRE.

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Emmanuelle, qu’est-ce que cela fait de mettre en scène une personne qui a le statut de "célébrité", comme Numa SADOUL ; cela a-t-il représenté une barrière dans ton travail ? Quelle a été ton approche de la question ?

Emmanuelle : J’en ai fait complètement abstraction, et ce n’était plus du tout une barrière au moment où je l’ai mis en scène, dans la mesure où ça faisait déjà plusieurs années qu’on se connaissait lui et moi ; où je l’ai remplacé de temps en temps dans ses ateliers, où il m’avait lui mis en scène dans « les Bonnes » avant. Et c’est vrai que lorsque moi je l’ai mis en scène à la demande de Meyer COHEN – je les ai mis en scène tous les deux dans « Inconnu à cette Adresse », de Kressman Taylor – donc pour moi, c’était plus le personnage, le Numa SADOUL connu etc., c’était un ami. On a noué des liens d’amitié profonds, donc pour moi on travaillait entre amis, entre personnes habituées à travailler ensemble. C’était plus le Numa SADOUL public, en fait, déjà à ce moment là. Mais c’est vrai que lorsque je l’ai rencontré au début j’étais très impressionnée. Et ça passe vite, parce que c’est vraiment quelqu’un de simple, c’est quelqu’un qui est dans l’écoute, c’est quelqu’un qui est dans le partage, qui est dans l’accueil, c’est quelqu’un de vraiment humble ; et en tant que comédien il est encore plus humble, parce qu’il se sent plus débutant comédien que metteur en scène – parce qu’il a fait énormément de mises en scène d’opéras qui ont fait grand bruit… Ah oui, oui, il a fait des trucs pas possibles [ Notamment « Madame Butterfly » ; pour en lire un des nombreux commentaires, cliquez ICI ]. Là il a une certaine assurance, et cette assurance il ne l’a pas quand il est comédien. Donc au contraire quand tu le mets en scène il est presque plus fragile.

Si j’ai bien compris, chacun a mis en scène les autres, c’est "chacun son tour" en quelque sorte. D’une manière plus générale, est-ce que c’est facile de diriger ceux qui t’ont dirigée ? De mettre en scène un metteur en scène ?

Emmanuelle : Ça peut, ça peut poser des problèmes, mais en fait tout dépend des comédiens qui sont sur le plateau et de l’humilité qu’ils ont et de l’envie d’avancer ou pas. Mais là la question ne s’est pas posée, parce que, en l’occurrence, dans « Inconnu à cette Adresse » j’avais donc Meyer COHEN et Numa, et c’est vrai que tous les trois, d’ailleurs Meyer il le dit lui aussi, on s’est tous mis en scène les uns les autres, on a tous joué les uns avec les autres, on a fait toutes les combinaisons possibles, sauf je crois Meyer et moi dans une mise en scène de Numa SADOUL…

Il faudra le faire alors !

Emmanuelle : Il faudrait que ce soit le prochain volet. Donc on était quand même dans une espèce d’habitude de travail mutuel, commun… Donc ça non plus ça ne s’est pas posé. Alors c’est vrai qu’ils ont tous les deux un œil de metteur en scène et qu’en plus c’était dans le théâtre de Meyer, c’était la production de Meyer, c’est vrai qu’à deux trois reprises, moi je leur ai dit « Non mais oh ! D’accord, mais ce sont mes idées, après on voit… » ; mais ça c’est très très bien passé, parce qu’on a l’habitude de bosser ensemble.medium_018.jpg

Est-ce que c’est au Conservatoire, en 1988-1990, que tu as fait tes premières armes ? Pourquoi avoir choisit pour ta formation d’aller vers cette institution ?

Emmanuelle : Non, ça n’a pas été la première fois. En fait j’ai un grand-père qui était comédien, qui était au Cercle Molière, donc j’ai eu accès au virus théâtral très jeune, quand j’étais enfant, et j’ai toujours voulu faire ça. J’ai grandit dedans tu vois. Puis moi en plus j’ai passé quelque temps à vivre chez mes grands-parents, donc forcément… C’est vrai que lorsque j’avais cinq ans, je savais que je voulais être comédienne. Donc j’ai talonné, talonné, talonné ; jusqu’à ce que, lorsque j’ai eu onze ans, mon grand-père demande à m’inscrire aux cours du Cercle Molière. Alors ils ont réfléchi avant… Parce qu’à l’époque il n’y avait pas de cours de théâtre pour enfants ou pour ados, tu vois tout ce qu’on fait maintenant. C’est pas que je sois d’un âge canonique, mais c’est assez récent finalement. Parce que mine de rien, j’avais quand même onze ans il y a vingt-trois ans. Donc il n’y avait pas de cours comme ça. Donc j’étais la p’tite gamine au milieu de gens de tous les âges. Après, j’ai tenté le concours d’entrée au conservatoire…

Comment se passe un concours de Conservatoire ?

Emmanuelle : Écoute, moi celui du Conservatoire de Nice, j’ai pas eu le sentiment qu’il soit très dur. A l’époque, au concours d’entrée on présentait une scène. Moi j’avais présenté une scène que j’avais pas mal travaillé au Cercle Molière avant.

 

Tu as combien de temps pour préparer une scène ?

 

Emmanuelle : À cette époque là, c’était une scène au choix. Tu la choisis toi, donc tu arrives avec ta scène qui est déjà prête. Maintenant, je ne me souviens pas si c’était une scène classique ou une scène moderne qui était imposée. Moi ce que je sais c’est que j’avais choisi une scène extraite de « Ruy Blas », de Victor HUGO. Après, ça dépend : quand j’ai tenté le concours du Conservatoire de Paris, c’est pas pareil. Tu arrives en présentant deux scènes classiques, deux scènes modernes et c’est eux qui choisissent : passez moi ça et ça… Ça dépend des écoles, ça dépend des conservatoires. Je ne sais pas comment ça se passe maintenant au Conservatoire de Nice, je sais pas. Puis après j’ai été au Cours Simon.

 

Pourquoi ? Tu as sentis qu’il fallait un complément, que le Conservatoire ne suffisait pas ?

 

Emmanuelle : Non, ça ne me suffisait pas. Et puis bon, comme tout le monde j’avais envie de monter à Paris parce que… le paysage théâtral Niçois était quand même très différent à ce moment là.

 

C’est vrai que ça a évolué depuis…

 

Emmanuelle : Il y avait moins de compagnies, il y avait moins de lieux… Voilà, je me suis dit : pour en faire mon métier, je pars d’abord me former à Paris, et j’essaye de réussir à Paris. Moi j’étais comme tout le monde, j’avais des rêves de Conservatoire de Paris, j’avais des rêves de Comédie Française, en toute simplicité bien sûr ! Et puis j’ai fait des stages, et puis j’ai bossé sur Paris. Jusqu’au jour où j’ai décidé de revenir. C’est vrai qu’à chaque fois que je venais en vacance chez mes parents, je me rendais compte qu’il y avait des compagnies qui se montaient, qui continuaient à exister, qui se développaient, qu’il y avait des lieux qui se créaient et qui perduraient, et ça donnait envie.

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C’est la fin de cette deuxième partie ; la troisième et dernière partie de l’interview très bientôt…