27/06/2012
HOMÉRIQUE
Depuis plusieurs années, créations, productions et compagnies extérieures sont parfois accueillies hors les murs du Théâtre National de Nice, sur les scènes "décentralisées" du théâtre Lino Ventura, du Centre Culturel de la Providence et du Théâtre Francis Gag à Nice ; du Lavoir Théâtre à Menton (et un partenariat étroit avec le futur Théâtre Communautaire d’Antibes qui verra le jour au printemps).
D’autre part, certains spectacles sont pressentis pour être montrés aux élèves des collèges et lycées de la région. C’est la raison pour laquelle le TNN invite le personnel enseignant à sa présentation de la saison, puis à des avant-premières.
Et samedi 23 juin au soir, c’était l’Odyssée d’après HOMÈRE qui était proposée au Centre Culturel de la Providence.
Je prétends souvent que les textes anciens ont été écrits pour un public disparu depuis 25 siècles. Les civilisations, les sociétés étant différentes, il est aujourd’hui difficile d’en retrouver sinon le sens, du moins les effets.
Le travail de conteur est peut-être la réponse la plus appropriée à ce problème. En proposant aux spectateurs des procédés les plus primitifs, peut-être se laissera-t-il happer par la force épique de l’histoire d’Ulysse et de ses argonautes tentant de regagner l’île d’Ithaque.
Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que Jacques BELLAY s’est efforcé de n’employer que des accessoires simples qu’auraient pu se procurer les conteurs de la Grèce Antique. Par exemple des silhouettes d’objets emblématiques de cette époque (trirèmes, casques, masques…) brandies au bout d’un bâton.
Un seul accessoire venait tout droit de notre monde moderne. Ou plutôt un dispositif de projection : une première projection sur une toile de fond, devant laquelle œuvrait le comédien ; et devant lui, un miroir semi-transparent réfléchissait une deuxième projection d’images.
Jacques BELLAY se trouvait ainsi pris en sandwich entre deux images vidéo, recréant l’atmosphère fantastique du texte d’Homère.
Il y avait ainsi une sorte de naïveté dans le procédé, et cela a fonctionné. On peut regretter quelques maladresses de l’artiste lors de la manipulation des accessoires, vite effacées par la grande maîtrise vocale de Jacques BELLAY.
L’architecture de l’ancienne chapelle désacralisée faisait trop résonner sa belle voix, laissant perdre certaines informations du texte. Lors de la vraie première, en janvier, des toiles seront tendues devant les murs afin de rétablir une bonne acoustique.
Qu’en disent les enseignants ? J’étais accompagné de quatre professeurs. Chacune a pensé que ce spectacle pouvait convenir à leurs élèves des classes de sixième, pourvu qu’ils aient été préparés à cette œuvre.
Encore faudra-t-il que les collèges et lycées puissent acheter ce spectacle, dont je ne connais pas le prix.
Notez dès à présent les dates de cette Odyssée : du 29 janvier au 16 février 2013, toujours au Centre Culturel de la Providence.
Durée ~ 01h10.
Tarifs : de 11 à 15 Euros.
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23/06/2012
CALVITIE PRÉCOCE
Le Théâtre de la Huchette, situé au 23 rue de la Huchette à Paris dans le 5ème, est menacé de fermeture. Plus exactement d’expulsion.
Ce théâtre devenu mythique car on y joue les deux pièces les plus connues de IONESCO — La Cantatrice Chauve et La Leçon — depuis près de 55 ans sans interruption, n’arrive plus à payer un loyer en constante augmentation.
Le prix des places (23 et 16 Euros) étant déjà assez élevé, il n’est pas possible de l’augmenter sans risquer de perdre les deux tiers du public (jeunes, étudiants, familles).
Les institutions publiques ont cessé de verser des subventions —environs 10 000 Euros si j’ai bien compris.
Plusieurs journaux, sites, et autres blogs en ont déjà parlé. Certains se font le relais de l’appel lancé par le Théâtre de la Huchette (cliquez ICI.)
J’ai beaucoup hésité avant d’en parler à mon tour. Tout simplement parce que je croyais qu’il s’agissait de sauver non pas ce théâtre, mais les deux pièces qui y sont représentées. Ou plutôt que certains semblaient plus attachés à cette sorte de record de longévité, façon TF1, qu’à l’œuvre elle-même. Pour un art réputé éphémère, est-ce bien raisonnable ?
Puis je me suis dit que cette volonté de ne pas rompre la chaîne était aussi une volonté de résister, de préserver une chose bien plus délicate et fragile ; un besoin de protéger le théâtre dans son ensemble, à une époque où l’avenir du Spectacle Vivant est devenu incertain. Un acte symbolique.
Je me suis aussi rendu compte, en allant me promener sur le site du Théâtre de la Huchette, que IONESCO n’était pas le seul auteur à être joué là-bas, et qu’une longue liste de pièces diverses et variées avaient été montées dans cette salle jaugeant 90 places, et employant plusieurs comédiens et techniciens du spectacle.
Une représentation d’une pièce de théâtre peut-elle appartenir à notre patrimoine culturel ? Attention, je ne parle pas du texte imprimé, mais bien du spectacle lui-même. J’ai beaucoup réfléchi disais-je, et n’ai pas trouvé la réponse.
Ceci étant posé, il serait dommage qu’un théâtre cède la place à une boutique de prêt-à-porter ou à un fast-food, que ce soit à Paris ou en province.
Espérons donc que les pouvoirs publics, à commencer par le Ministère de la Culture et Communication, aient un geste pour ce lieu connu dans le monde entier — évitant ainsi au Spectacle Vivant une calvitie précoce. (ho ! ho ! ho !)
Beaucoup de sites nous livrent une explication du choix du titre de la pièce la plus connue d’Eugène IONESCO. La pièce s’appelait à l’origine L’anglais sans peine, puis aurait ensuite changé plusieurs fois de nom. Mais le comédien qui interprétait le capitaine des pompiers, Henri-Jacques HUET, aurait commis un lapsus au cours d’une répétition et aurait prononcé « cantatrice chauve » au lieu de « institutrice blonde » et c’est ce titre qu’aurait retenu l’auteur de la pièce.
Cette explication "tirée par les cheveux" (re ho ! ho ! ho !) est pourtant répétée partout et semble vraie. Malheureusement, le comédien concerné étant décédé en 2009, il sera difficile d’obtenir confirmation d’une anecdote survenue il y a plus de 50 ans.
Autre précision, beaucoup affirment que la Cantatrice Chauve détient le record mondial du nombre de représentations, 17 300 environs. Ce n’est pas vrai, le record appartient à The Mousetrap (La Souricière) pièce de théâtre d’Agatha CHRISTIE, d’après une de ses propres nouvelles. Jouée depuis maintenant 60 ans, elle totalise 23 000 représentations.
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12/06/2012
C'EST PAS LA CATA
En feuilletant mon Dictionnaire de la Langue du Théâtre, j’ai pu y lire que le mot catastrophe vient du théâtre ; plus précisément du grec katastrophê.
Ce mot désignait alors un bouleversement, un renversement. Ce mot fut ensuite utilisé au théâtre, après 200 avant J.C., pour désigner un changement décisif, un "renversement" vers la fin de la pièce.
Comme il s’agissait d’une tragédie, ce mot évoquait quelque chose de malheureux, mais plus tard, les latins lui donnèrent un sens plus large : celui du dénouement d’une tragédie OU d’une comédie.
Pendant de long siècles, ce mot conservera cette acception avant de revenir à un sens plus terrible.
Théâtre d'Épidaure (Épidavros)
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01/06/2012
LES CAPRICES DE L'EAU
Ironie du sort. Il y a quatre jours, je déplorais que la pluie ait interrompu les fameuses Déantibulations 2012 à Antibes. Et voilà que la Cie Antipodes demande à la ville de Nice de rouvrir les robinets des fontaines, pour les besoins de son spectacle.
En effet, cette compagnie propose au public une « répétition ouverte » du spectacle de danse intitulé Dernier Rendez-vous.
La Cie Antipodes, qui s’est fait une spécialité des spectacles de danse en extérieur, explore ici les possibilités qu’offrent les fontaines des villes. Les danseurs transpireront peu, mais mouilleront malgré tout leurs costumes…
Mise en scène de Lisie PHILIP Avec Morena DI VICO et Michaël PASCAULT
C’est aujourd’hui à 15h00, place Fontaine du Temple, à Nice Nord (presque au bout de la ligne de tramway).
La fiche technique annonce une durée d’environs ¼ d’heure.
La photo, signée Richard COVELLO, montre une fontaine classique de type monumental. Les jets d’eau de la place Fontaine du Temple offrent une disposition différente puisqu’ils sont à même le sol de la place, et qu’on peut les programmer pour varier les effets.
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En avril, j’avais parlé d’une étude sur l’état du Spectacle Vivant. Celle-ci décrivait la différence structurelle entre les compagnies à rayonnement régional et celles à rayonnement trans-national (cliquez ICI et LÀ pour relire les deux articles).
La Cie Antipodes fait partie de la deuxième catégorie. C'est-à-dire qu’elle arrive à montrer ses productions hors des frontières de la France, mais aussi sur tout le territoire national.
Pour autant, son siège social reste à Nice. Et cette « répétition ouverte » d’aujourd’hui a lieu à deux pas de leur domicile… et du miens !
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