15/04/2011
Coups et blessures ordinaires
Pour cette 6ème note consacrée à nos répétitions hebdomadaires, je pouvais vous montrer la régie très bien équipée du Théâtre Athéna ou bien vous raconter comment Alfred a failli se faire mal en dégringolant de l’échelle qui monte à la régie (vraiment très bien équipée… sauf pour l’échelle d’accès).
Mais voilà que, s’étant remis de ses émotions, Alfred m’a raconté une anecdote, malheureusement représentative des difficultés que j’ai déjà évoquées au sujet des salles de spectacle. Voici toute l’histoire :
Un de ces petits théâtres, nouvellement créé, a choisit de programmer des comédies dites grand public. Ce terme générique signifie qu’il s’agit de la grosse cavalerie, d’une machine à faire rire : deux ou trois personnages, une affiche avec une tête rigolote et un titre un peu coquin, ou bien une comédie qui cartonne à Paris et dont on parle à la télé, et les 50 ou 100 places se rempliront bien chaque samedi soir.
Ce genre de pièce permet aux lieux nouvellement créés de mettre le pied à l’étrier et de se faire connaître. Moi-même ne crache pas sur ce genre de spectacle, puisqu’il m’a offert 50 % des rôles que j’ai tenus.
Ce petit théâtre avait donc choisi une comédie à succès pour la deuxième partie de la saison, et le public était au rendez-vous. Or, pour la Saint-Valentin, l’auteur de la pièce avait réfléchi et s’était dit que, lors du week-end des amoureux, son œuvre allait sûrement attirer encore plus de monde ; en tout cas plus que ne pouvait en contenir le petit théâtre. Il alla donc trouver le directeur du lieu en lui disant que, exceptionnellement, il lui retirait les droits d’exploitation juste pour un week-end, afin de faire jouer sa pièce dans un autre théâtre de la ville, trois fois plus grand. Une fois la Saint-Valentin passée, il redonnerait la permission au jeune théâtre de continuer à produire sa pièce. Ainsi, en échange de l’exclusivité pour le week-end, l’auteur a pu remplir une grande salle… et son portefeuille.
Comment a réagi l’équipe du petit théâtre ? En serrant les dents car, n’ayant pas d’autre spectacle pouvant remplacer celui-ci, ils ne pouvaient pas se disputer avec l’auteur et risquer de perdre, définitivement cette fois-ci, les droits d’exploitation.
Quelques semaines plus tard, ce même auteur leur proposa de jouer sa nouvelle pièce ; pour les consoler ou bien parce qu’il savait qu’ils ne pouvaient pas encore se passer de lui ? Je ne le sais pas, je sais seulement que c’est très dur lorsqu’on veut faire vivre un théâtre.
Heureusement, la régie est très bien équipée...
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