29/03/2013
LES STANCES DU BLOG
Cet article n’est que la synthèse de deux autres, parus en octobre et novembre de l’année dernière (cliquez ICI et LA pour les relire). Toutefois, j’éprouve une forte envie de reparler d’un sujet qui me trotte dans la tête ces derniers temps.
Car en rejouant ces deux dernières semaines Deux sur la Balançoire, l’idée s’est précisée davantage et je vous l’expose ici d'une façon que j'espère concise :
les plus belles tirades ne sont rien sans l’énorme édifice qui les supporte, sans les mille petites répliques, les innombrables petits riens qui leur servent d’écrin — ou plutôt d’échafaudage.
C’est toute la différence entre un bijou et une pièce de théâtre : le diamant le plus pur comme le saphir le plus quelconque peut briller tout seul, même s’il n’est pas enchâssé dans un bijou monumental.
Mais une tirade, qu’elle soit de Musset, de Molière ou de Tennessee William, ne peut pas survivre en étant détachée du texte. Et j’avoue aujourd’hui que je prends désormais plus de plaisir à assembler ces tous petits morceaux de phrases de rien du tout plutôt que de dire les grandes répliques du répertoire.
Vous allez me dire qu’il suffit de prononcer les quelques mots « Rome, l'unique objet de mon ressentiment… » pour que chacun se remémore avec enthousiasme la suite des vers de Corneille :
« Rome, à qui vient ton bras d'immoler mon amant !
Rome qui t'a vu naître, et que ton cœur adore !
Rome enfin que je hais parce qu'elle t'honore ! »
Mais là, il s’agit d’une pièce et d’un auteur qui ont été étudiés dans le monde entier par des générations d’élèves de tous âges. Et en extraire quelques vers pour les citer équivaux à les replonger instantanément dans l’œuvre d’où on vient de les tirer. Vous pourriez les imprimer sur une boite de camembert ce serait pareil, c’est vers-là ne pourront plus jamais être isolés, comme le diamant que l’on ne pourrait plus arracher à sa bague.
Mais les autres, toutes les autres, toutes ces tirades, ces monologues, récits, stances et autres répliques fameuses, elles sont parfois nécessaires à la pièce, mais elles n’en sont que rarement la clé de voûte. Elles sont situées tout en haut d’une solide charpente… qui tient toute seule et n’a pas forcément besoin d’un ornement supplémentaire.
Loin de moi l’idée d’être iconoclaste et je ne crache pas sur les plus beaux textes du théâtre, je dis simplement que les bons auteurs dramatiques savent faire autre chose que de jolies phrases. Et c’est heureux pour les comédiennes et les comédiens. Imaginez notre impatience s’il nous fallait attendre à chaque représentation d’arriver enfin à la "grande scène du II" pour pouvoir nous régaler d’être sur scène !
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