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26/09/2008

La vérité est en marche...

En avril de cette année, j’avais relayé sur ce blog l’information concernant le différent qui oppose toujours la nouvelle équipe municipale de CUERS à une association culturelle qui produit des spectacles, notamment du théâtre de rue (cliquez ICI, puis , pour relire les articles).
Manifestement, cette histoire n’est pas enterrée. Voici un communiqué établi par « l'Observatoire de la Liberté de Création » et par la section de Toulon de la « Ligue des Droits de l'Homme » :

Gilbert PERUGINI, nouveau maire de CUERS, s’est signalé au printemps dernier. Il a interdit dans sa ville un spectacle de rue, puis attaqué une compagnie invitée pour « dégradation de la voie publique, incitation à la désobéissance et atteinte à la République (outrage à drapeau) », puis tenté de poser des scellés sur la bibliothèque de théâtre Armand-Gatti qui abrite les locaux de la compagnie Orphéon.

Il vient de s’illustrer par un nouvel exploit. Le maire ose écrire : « Etant donné l’absence de réponse de Monsieur le Procureur de la République suite à la plainte déposée par nos soins, nous vous confirmons notre décision de suspendre jusqu’à nouvel ordre toutes les activités de votre association. » Le courrier a été remis par des policiers municipaux à la présidente de l’association Orphéon le 4 septembre.

Le travail théâtral est réputé dans toute la région PACA, mais aussi par ses pairs (elle a reçu au printemps un Prix des Écrivains associés du théâtre). La décision du maire l’informant d’avoir à cesser toute activité aurait notamment pour conséquence la fermeture d’une bibliothèque théâtrale unique, contenant plus de 9 000 volumes.

La section de Toulon de la Ligue des Droits de l’Homme et l’Observatoire de la Liberté de Création demandent solennellement à Madame le ministre de la Culture, et au préfet du Var, d’intervenir auprès de cet élu pour mettre un terme à ces voies de faits, et aux menaces, intolérables dans une démocratie, qu’il fait peser sur cette association.

Paris, le 10 septembre 2008

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Ensuite, je ne résiste pas au plaisir de reproduire ici un texte signé Jacques LAURESTURE, pseudonyme protégeant un responsable culturel soumis à un certain devoir de réserve :

Monsieur le Maire, nous tenions à vous féliciter de votre courage pour avoir osé braver l’irruption artistique qui risquait d’endommager cruellement la ville de Cuers.
En effet, une artiste, Kristin, 52 ans, prétendait écrire sur les murs ou sur l’asphalte des textes dangereux, pire, poétiques. Évidemment, ils ne seraient pas restés très longtemps, la peinture disparaissant assez vite. Mais imaginez la situation sans votre valeureuse intervention : les citoyens, intrigués par des phrases incongrues, auraient fait appel à leur intelligence, à leur curiosité, à leur sensibilité. Plus grave, l’automobile, reine absolue de l’espace public, aurait perdu une part de sa suprématie. Et enfin, la publicité, qui orne si avantageusement tous les recoins de notre paysage visuel, aurait subi la concurrence d’un acte gratuit, sans but commercial, un pur objet de plaisir et d’intelligence.
On touchait là à l’essence même de notre civilisation, et votre détermination a permis d’éviter une catastrophe à côté de laquelle le 11 septembre apparaîtrait comme un fait-divers.
Avec courage, vous avez défendu le drapeau français qui risquait d’être souillé à jamais. Passons sur l’origine douteuse de ce symbole créé par des insurgés ne respectant pas la légalité de l’époque, mais comment en effet oser moquer l’oriflamme qui a si bien civilisé les Africains ou rempli les tranchés de Verdun ? Votre décision de remettre toute affaire cessante une fleur de lys dans le blason de votre ville nous remplit d’espoir.
Votre plainte devant les tribunaux est également promise à un bel avenir. Nul ne doute que les juges, n’ayant que cela à faire, vont convoquer la contrevenante en urgence. Peut-être faudrait-il exiger que cette affaire soit traitée par une juridiction anti-terroriste car, à part Al Quaïda, qui aurait planifié une attaque aussi basse de votre cité ?
Nous avons été un peu déçus par votre recul quelques jours plus tard. En effet, poursuivant votre valeureuse croisade, vous avez tenté de retirer la garde de la bibliothèque Armand Gatti (un anarchiste, soi-disant résistant et déporté) à ceux qui l’ont créé, Orphéon Théâtre Intérieur.
Vous aviez raison, les livres sont dangereux, et demandent à être mis sous bonne garde. D’autant que ces livres ne servent pas seulement à caler la commode, ou à décorer le salon, mais qu’ils sont lus, souvent par des enfants, et qu’ils parlent de théâtre, activité qui détourne des deux piliers de notre société : l’écran plasma et le caddie à remplir.
Mais nous sommes inquiets et nous craignons bien que, malgré vous, vous n’ayez apporté finalement bien de l’eau au moulin de ces irresponsables. Vos adversaires vous attaquent, soit. Mais les journaux se moquent de votre action intrépide, vos alliés politiques se taisent en public et vous maudissent en privé de se retrouver associé aux mêmes agissements qui avaient fait la gloire du Front National à Châteauvallon ou à Vitrolles.
Ces maudits Orphéon reçoivent tous les jours de nouveaux soutiens, de nombreuses villes veulent inviter la compagnie que vous avez voulu bâillonner, de plus en plus de citoyens veulent que l’art ait une place dans nos villes, et votre acte passe avant tout comme ridicule.
Confiance, la postérité sera pour vous. À l’heure où vient de s’éteindre le maire-poète Aimé Césaire (à ne pas confondre avec la sympathique Aimée Geyser, lauréate du Grand Prix de l’Eurovision 1967), vous le dépassez déjà par votre prouesse : il a passé sottement sa vie à faire parler les mots, vous avez réussi à les goudronner.

Pour l’instant, il y a beaucoup de voix qui s’élèvent pour s’indigner ; des voix, des mots, comme ceux que j’inscris ici, seulement des mots. J’attends avec impatience que tous ces discours débouchent enfin sur une solution concrète. Espérons.

« La vérité est en marche, et rien ne l’arrêtera. » (il y a des fois où l’injustice est si flagrante, tellement révoltante, que l’on en vient à se prendre pour ZOLA)