07/10/2007
Messieurs ! le jury !
Il y a une situation confortable et incommode à la fois : être membre d’un jury.
Vendredi soir, j’ai eu l’occasion d’être parmi ceux qui avaient à juger les spectacles qui étaient programmés durant trois jours, du 28 au 30 septembre dernier.
Oui, le grand mot est lâché, le mot qui fait toujours débat dans l’univers de la culture : « JUGER » Arghhh !
C’est que, s’il est déjà difficile d’accepter l’idée d’être évalué ou même comparé, ça l’est encore plus dans le domaine de l’art, secteur où le verbe « mesurer » ne signifie pas grand chose. Exercice d’autant plus ardu que l’artiste, s’il est honnête, met une part de lui-même dans ce qu’il accomplit. C’est ainsi qu’il y a les festivals AVEC récompense(s) et les festivals SANS récompense. Au Théâtre de l’Impasse, ils avaient choisi d’organiser leur premier festival AVEC une compétition. On m’a appelé, je suis venu.
Pour ma part, cela ne me choque pas que l’on puisse mettre des spectacles « en compétition ». C’est même une excellente école, car on apprend à soumettre notre œuvre au regard tout à fait subjectif d’un public. Quoi qu’il arrive, en dehors de toute compétition, le spectacle sera de toute façon jugé par ceux qui le reçoivent ; et si le chalenge est un peu différent, il n’en reste pas moins cruel parfois, imprévisible aussi mais toujours légitime. Même si le public est composé d’imbéciles, d’incultes, de cuistres et d’emmerdeurs, nous avons tous le droit de porter un jugement sur l’œuvre que l’artiste porte à notre regard.
Et c’est d’ailleurs cela qui m’a gêné lorsqu’on m’a présenté comme « membre du jury » : J’étais celui qui juge, et les autres, par conséquent, ceux qui ne jugent pas (ou au moins dont l’impression importe peu).
Vous l’avez compris, je ne prétendrai jamais que mon avis prévaut sur celui des autres ; en revanche, j’ai pris mon rôle au sérieux : on me demandait mon appréciation pour chaque show que je verrai, j’en ai marqué toute une tartine pour chacun, davantage pour expliquer et décortiquer que pour dire si c’était bon ou mauvais. Mais il fallait également donner une note sur vingt, je me suis plié à cette exigence. Selon le prestige de la manifestation culturelle, remporter le prix peut changer une vie, dans d’autres cas, on gagne une médaille en chocolat. Ici, il s’agissait quand même d’un chèque qui n’était pas de bois : 300 €uros, destiné au vainqueur parmi [ … de jeunes auteurs-comédiens qui ont travaillé toute la saison passée pour écrire, monter, tester leur nouvelle création et souvent leur premier spectacle. Durant la saison 2007-2008, ils n'auront de cesse que de jouer et se faire connaître du plus grand public… ] comme nous l’indiquait le programme de ce festival.
Lorsqu’on on tente l’aventure d’un spectacle, il faut être prêt à tout. Comprenez : il faut être prêt à recevoir tous les coups imaginables. Il faut apprendre à se protéger de la désillusion, de l’indifférence, de l’incompréhension, de la défaite et des mauvais jours, des conflits avec les organisateurs, les artistes, les ennemis et les amis, il faut se rendre plus solide face à une remise en cause de soi qui est permanente. Quoi de plus partial qu’un jury, si ce n’est le public lui-même ? Est-ce une bonne ou une mauvaise chose ? Qu’importe, c’est ainsi, et il faut s’y préparer. Pour cela, rien de mieux que de participer à de telles manifestations.
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