09/04/2009
Je vous salue
Lorsque nous saluons le public, à la fin d’une représentation, est-ce pour le remercier de ses applaudissements ? Est-ce pour lui signifier que nous sommes sensibles à son effort d’être venu là ?
Pour ma part, il me semble que lorsque je m’incline respectueusement devant un groupe de spectateurs, c’est aussi pour saluer l’existence, éphémère mais pourtant bien réelle, d’une entité très particulière.
Une sorte de personnage, composé de l’ensemble des individus présents le temps de la représentation. Ce groupe que nous formons a une vie à part entière, et aussi une âme.
Mon professeur de théâtre avait pour habitude de nous raconter que les Grecs appelaient « barbares » les autres peuples qui ne connaissaient pas le théâtre.
Même si les cités grecques avaient en réalité d’autres raisons de traiter de barbares les populations extérieures, il reste vrai qu’elles étaient les seules à pratiquer cette cérémonie si particulière.
Cet échange collectif, limité dans l’espace et dans le temps, durant lequel des humains ont décidé de donner et de recevoir (oui, oui, ça marche même pour les bonnes grosses comédies…) de communiquer, d’échanger, selon des codes qui sont différents de ceux utilisés normalement dans la vie courante.
Ce même professeur s’enflammait parfois en nous expliquant que les personnages sont supérieurs aux humains car ils nous survivront, tant qu’il y aura un public capable de comprendre et d’appréhender le spectacle qui se déroule devant lui.
Peut-être. Mais le public et les artistes forment eux aussi une entité terriblement éphémère, mais d’une grandeur considérable.
Et aujourd’hui encore, à chaque fois je savoure le privilège de participer à ce mécanisme mis en place peu à peu dans différentes civilisations. Ce mécanisme étrange où les citoyens ont besoin de communiquer autrement.
C’est ainsi que chaque représentation étant unique, chaque groupe est lui aussi unique. Et c’est ainsi qu’en saluant, ou en applaudissant, nous confirmons l’existence de cet être si incroyable… et que nous lui disons adieu. Forcément
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